Découverte :
Le jour où l’on m’a expliqué la Théorie Polyvagale (TPV) de Stephen Porges et Déborah Dana, ça a été un véritable déclic dans ma compréhension du fonctionnement du système nerveux et de nos comportements. Tellement que je suis allé me former pendant plus de 15 jours avec Déborah Dana.
Et ça a été aussi, par la voie de la compréhension, une grande voie de déculpabilisation en comprenant comment fonctionnait notre SYSTEME NERVEUX AUTONOME et les choix des comportements et des croyances qui en découlent.
Régulièrement il m’arrive d’expliquer la TPV à mes patients afin qu’ils puissent mettre du sens dans leurs comportements ou leurs symptômes…je vais donc tenter de vous faire une première approche.
La NEUROCEPTION :
Il faut comprendre que notre Système Nerveux est un véritable expert pour détecter les indices de sécurité et surtout d’insécurité dans notre environnement (les sons, la lumière, les lieux, les odeurs, peuvent êt
re des indicateurs d’insécurité/danger pour notre système de vigilance), dans notre corps (un problème digestif en lien avec des tensions viscérales sera interprété comme un indice d’insécurité), et dans nos relations avec les autres (si la personne en face de nous s’approche trop prêt de nous par exemple, ou si elle parle trop fort, ou selon sa posture ou son expression faciale, etc…). Et comprendre que nous n’avons pas forcément conscience de l’ensemble des indices de sécurité et d’insécurité que notre système nerveux prend en compte. Cela est un premier point et c’est ce qu’on appel la Neuroception.
Pour résumer la Neuroception c’est la capacité automatique de notre système nerveux à détecter la sécurité ou la menace — avant même que notre cerveau conscient ne s’en rende compte. C’est comme un radar intérieur.
Ce n’est pas un raisonnement, c’est une perception corporelle et émotionnelle non consciente.
Selon ce que le corps perçoit, trois états s’enclenchent instinctivement :
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- Sécurité → ouverture, lien social, apaisement.
- Menace modérée → activation du système sympathique (fuite ou combat).
- Menace extrême → figement ou dissociation
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Exemples concrets :
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Tu rencontres quelqu’un et, sans savoir pourquoi, tu te sens immédiatement à l’aise : ta neuroception détecte la sécurité.
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À l’inverse, tu entres dans une pièce et ton corps se tend avant même que tu aies pensé quoi que ce soit : ta neuroception perçoit une menace (même subtile).
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Chez des personnes marquées par un traumatisme, ce système d’alerte peut devenir hypersensible : elles perçoivent du danger là où il n’y en a plus réellement.
En Thérapie le travail consiste souvent à rééduquer la neuroception, c’est-à-dire à aider le système nerveux à reconnaître la sécurité réelle. Cela passe par la relation thérapeutique, la présence, la respiration, le contact corporel juste, ou toute approche qui redonne au corps la possibilité de sentir “je peux être en lien sans danger”.
Le second point important est de comprendre que selon dans quel état se trouve notre système nerveux au préalable, cela va influencer notre analyse de la situation, nos pensées, notre vision du monde, nos croyances, etc…
Lors de l’apprentissage de la théorie polyvagale nous faisons par exemple un exercice où l’on propose successivement 3 visualisations correspondant à 3 états différents (sécurité, danger/stress, danger d’immobilisation/abandon) et on nous pose la question de savoir quelle est alors notre vision du monde. Et c’est assez incroyable de voir que selon l’état, nos lunettes de vision du monde sont complètement différentes et que nos perceptions sur notre environnement et nos croyances changent complètement aussi.
On peut s’imaginer simplement le fait de rencontrer une personne qui a besoin de nous alors que l’on a un gros stress à régler. Il pourra être éventuellement perçu par notre système comme une menace supplémentaire (une charge à s’occuper en plus). Ou si nous voyons ce même ami à un moment ou nous nous sentons en sécurité il sera alors l’opportunité de partager un moment de connexion, de lien et de pouvoir contribuer à rendre son monde meilleurs ce qui pourra mettre du sens dans notre vie.
🧠 Les trois états du système nerveux selon Porges
Ce n’est pas un “modèle psychologique”, mais une cartographie physiologique des états d’être :
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Système ventral vagal – sécurité et lien
Le visage s’ouvre, la voix s’adoucit, le cœur bat calmement. On peut penser, aimer, être curieux.
→ “Je suis en sécurité, je peux être en lien.”
Système sympathique – défense active
Le corps s’active : tension musculaire, vigilance, accélération cardiaque.
→ “Je dois fuir ou me battre.”
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Système dorsal vagal – défense passive
Ralentissement extrême, anesthésie émotionnelle, déconnexion.
→ “C’est trop. Je me retire pour survivre.”
Chaque être humain navigue entre ces états tout au long de la journée.
On peut être dans un sympathique régulé et un sympathique dérégulé. Un sympathique régulé va me permettre de courrir pour prendre le bus ou le métro, va me permettre de m’activer pour faire du sport ou un jeu. Tandisqu’un sympathique dérégulé je vais peut être m’énerver grandement pour un bonjour que je n’ai pas eu, ou avoir peur quand je croise quelqu’un habillé d’une certaine manière qui me rappel un danger passé, etc…
Un dorsal dérégulé c’est souvent l’état de dissociation, qd je fais fasse à un danger sans solution auquel je ne peux ni fuir ni combattre.
Mais le dorsal régulé c’est celui qui permet de se reposer, se détendre, aller dormir, méditer, se prélasser, récupérer, etc…
🌿 La corégulation : une synchronisation neurophysiologique
La corégulation désigne le processus par lequel deux systèmes nerveux autonomes s’influencent mutuellement pour maintenir ou restaurer un état d’équilibre physiologique.
Ce concept, repose sur l’idée que la sécurité est d’abord une expérience corporelle relationnelle, non pas un choix conscient.
Le système nerveux ventral vagal, responsable de la connexion sociale, se régule à travers des signaux non verbaux :
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le ton de la voix,

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la prosodie (musicalité du langage),
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l’expression faciale,
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la posture,
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le rythme respiratoire,
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la qualité du regard…
Ces indices sensoriels sont perçus par la Neuroception, qui évalue en permanence si l’autre représente une source de sécurité ou de menace.
Lorsque la sécurité relationnelle est détectée, les deux systèmes nerveux s’accordent :
le rythme cardiaque se stabilise, la respiration s’allonge, la tension musculaire diminue.
Des études montrent même une synchronisation des rythmes cardiaques, respiratoires et cérébraux entre deux personnes en interaction empathique.
C’est un phénomène biologique avant d’être psychologique : nos systèmes nerveux se parlent en permanence, à travers le ton de la voix, le regard, le rythme respiratoire, la posture.
Quand l’un est apaisé, il envoie inconsciemment au corps de l’autre le message : « tu peux te détendre, tout va bien. »
Chez les mammifères, la sécurité ne se crée pas seul. Elle naît dans la relation.
Un nourrisson se régule au contact du visage et du souffle de sa mère ; un adulte stressé retrouve son calme grâce à la présence stable d’un ami, d’un thérapeute, ou même d’un animal apaisé.
La corégulation n’est donc pas une technique, mais un dialogue physiologique.
Quand le thérapeute respire lentement, reste ancré, présent, le système nerveux du patient s’accorde naturellement.
C’est un langage sans mots, où le corps de l’un devient ressource pour le corps de l’autre.
Et peu à peu, cette régulation partagée devient autorégulation : le corps apprend à reconnaître la sécurité, même seul.
La corégulation constitue ainsi la base physiologique de l’attachement, de la confiance et de la relation thérapeutique.
Dans un cadre de soin, le thérapeute agit comme un régulateur externe : sa stabilité physiologique devient un modèle implicite pour le corps du patient, qui retrouve peu à peu sa propre capacité d’autorégulation.
En somme, la corégulation est un dialogue neurobiologique entre deux systèmes nerveux cherchant ensemble la sécurité.
La TPV en résumé :
Pour dégrossir le fonctionnement de notre système nerveux les fondateurs de la TPV (Porges et Deb Dana) ont établi 3 états différents sur ce qu’ils appellent l’échelle autonome. Anciennement on parlait seulement du système sympathique et parasympathique.
On parlera ici pour simplifier de 3 états, l’état vagal ventral, l’état sympathique et l’état vagal dorsal
- L’état ventral est lorsqu’on se sent en sécurité, en lien, en connexion
- L’état sympathique est lorsqu’on sent un danger et qu’il faut se mobiliser, fuir ou combattre (fight and flight)
- L’état vagal dorsal est lorsqu’on ne peut plus échapper au danger et que l’on abandonne, on fait le mort en quelques sorte…et le système nerveux s’effondre. On remarquera que faire le mort est aussi une stratégie de survie
Vous verrez une vidéo ci dessous avec l’impala (qui se termine bien pour les ames sensibles) qui montre cet état de figement face à un danger de mort où l’on ne peut plus fuir. Il est intéressant de voir le lien avec certaines situations de la vie de tous les jours où on peut se retrouver jours après jours face au stress, ou à des personnes « toxique ». Notre système nerveux, s’il a lutté pendant longtemps et en vain peut parfois prendre cette option de « s’éteindre », « se couper » provisoirement le temps que passe le danger. Dans la vidéo on voit qu’une fois le danger écarté, l’Impala peut réactiver son système sympathique pour fuir en évacuant notamment par les tremblement (on développera cela aussi dans un prochain article), l’excès d’énergie qui s’est accumulé dans le corps. Nous avons le même système chez l’homme.
Je vous partage aussi cette autre vidéo déjà posté sur mon site qui est très explicative des différents états, en lien notamment avec les traumas et stress. Les traumas feront aussi l’objet d’un autre article.
Je finirai par une phrase de Deborah Dana pour définir la TPV :
« La TPV est la science de la connexion, la science de se sentir assez en sécurité pour tomber amoureux de la vie et prendre le risque de vivre… »
